dimanche 15 septembre 2019

La profession de femme (Acte IX)

Douée naturellement en marketing, cette publicitaire new-yorkaise de renom a le vent en poupe. Elle enchaîne les trouvailles et s'accapare d'un marché où la concurrence est une guerre sans merci. Hakima avait tout juste 19 ans lorsque sa mère Rahma, traductrice et interprète de profession, se décida à quitter le plus beau pays du monde pour s'installer aux States.

Rahma avait réussi le concours de "Arabic inguist" qui a eu lieu le 25 juillet 2000 à Genève. À cette époque, ce genre de concours ne se tenait pas encore dans les pays du Maghreb faute de candidats. C'était une pure coïncidence qu'elle se trouvait à Genève cet été là. Son mari devait rendre visite à sa sœur qui, depuis quelque temps, souffrait d'une maladie incurable et tabou à ce moment là : le SIDA.

C'est sa sœur aînée, Kenza, qui a payé ses études après le décès de son père. C'est grâce à la vente de l'atelier de menuiserie qu'elle était partie en Suisse avant d'obtenir son bac. Elle a dû travailler dur, surtout de nuit, pour subvenir aux besoins de ses 2 frères et 3 sœurs. Leur mère n'avait survécu que quelques semaines après la perte de son partenaire.

Rahma, devenue traductrice grâce à sa mère, secrétaire du Procureur du Roi, se rappelle exactement du jour où elle lui demanda de venir au tribunal pour traduire les propos d'un étranger accusé de pédophilie car aucun traducteur n'était disponible ce samedi 23 mai 1981. Elle avait la trouille...Elle n'était qu'une collégienne, qu'un  enfant qui maîtrisait plus ou moins l'arabe et le français. Elle ne voulait point être en contact avec un prédateur sexuel qui vise les enfants. Mais elle assura. Son avenir fut scellé à ce moment là.

Clairement douée depuis son jeune âge, Hakima a suivi les pas de sa mère : ne jamais craindre les hommes, mais prendre toujours ses distances...Elle a pu poursuivre ses études et se frayer un chemin dans le monde du marketing dans un contexte si difficile : la période postérieure au 11 septembre 2001 et à New York, la ville meurtrie.

Aujourd'hui, sa mère Rahma, partie à la retraite depuis deux ans et ayant préféré le retour au Maroc parce que telle était le souhait de son défunt mari, se retrouve coincée dans sa villa de 1000 mètres à Dar  Bouazza car les habitants des bidonvilles ont été relogés aujourd'hui dans des résidences à proximité de sa demeure. Elle craint pour sa vie, elle craint d'être attaquée par ces personnages qui ne portent pas d'armes, mais qui sont capables de tout. Hakima a le devoir d'être au chevet de sa mère. Reviendrait-elle? Ou, plus justement, viendrait-elle?

On n'en sait rien...Tout ce que l'on peut savoir c'est qu'elle soit épouse, mère, sœur ou fille, la femme peut être au service de son prochain, directement ou indirectement...

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