lundi 22 juillet 2019

Boycott et Conseil de la concurrence


Avant même la fin de l’année critique de 2018, le Maroc et les Marocains semblent avoir tourné la page. A l’approche de 2019, le boycott semble avoir disparu, volatilisé tout subitement comme il a commencé. Cette disparition, cet arrêt du boycott semble à première vue inexplicable. Car même aux cafés, on ne sert plus du café avec de l’eau minérale provenant de la rive du Nord, tel que « Cazorla » et « Mondariz », ni des concurrents nationaux, tels que « Ain Ifrane » ou « Ain Soltane », mais bien une bouteille de « Sidi Ali ».
Les consommateurs ne se plaignent plus, n’échangent plus à propos de ce sujet sur les réseaux sociaux. Quelque chose a dû arrêté tout cela. En réalité, la disparition du boycott tient à plusieurs facteurs. D’abord, et contrairement à leur réaction de départ, deux entreprises sur trois ont reconnu publiquement leur défaite. Elles ont même détaillé l’ampleur des pertes consécutives au boycott. Quant à la troisième entreprise, elle a choisi non pas la presse, mais le contact direct et indirect avec les consommateurs les plus mécontents, à savoir les jeunes.
Afriquia Gaz a amélioré la qualité de ses services en essayant d’être plus à l’écoute de ses clients. Elle  A également affiché les tarifs les plus bas des carburants par rapport à ses concurrents. Dans les espaces Afriquia, les animations pour enfants font désormais partie du décor quotidien des aires de services sur le réseau des autoroutes du Maroc. Bien plus, au niveau médiatique, elle est présente à travers un spot publicitaire original diffusé avant et après les matchs de foot-ball.
Autant dire que les efforts pour se rattraper ont été nombreuses et variées. Mais ce n’est pas une raison suffisante pour expliquer cet arrêt immédiat du boycott vers fin novembre 2018. Nous avons beau cherché un événement qui coïncide avec cette date et qui peut nous fournir cette explication dont nous avons besoin. Nous n’avons trouvé qu’un seul événement de nature politico-économique d’une grande pertinence par rapport au boycott. Il s’agit de la réactivation du Conseil de la Concurrence.
Cette instance constitutionnelle, restée inactive depuis 2013 jusqu’à novembre 2018, bien que son nouveau statut adopté depuis 2014 lui confère des attributions plus élargies en matière de régulation des marchés et de la protection du consommateur, en vertu même de loi 104.12 relative à la liberté des prix et de concurrence adoptée la même année (2014), a enfin été réactivée après la nomination par SM le Roi de son Président et de son Secrétaire général le 17 novembre 2018.
Nous pensons que cet événement est de taille à donner aux Marocains de l’espoir qu’à l’avenir leurs droits à une vie décente et moins chère ne seront plus bafoués. Car ce Conseil dispose désormais d’un pouvoir décisionnel et  peut même infliger des sanctions pécuniaires à l’encontre des entreprises qui prennent le consommateur en otage.
Le marché dispose désormais d’un « arbitre constitutionnel » qui peut intervenir au cas où mêmes les petites entreprises se trouvent menacées par des pratiques anticoncurrentielles qu’elles soient commises par des entreprises marocaines ou étrangères plus grandes. Il peut sortir ses cartons jaunes et rouges face à toute contravention puisque les sanctions  qu'il est à même d'infliger aux contrevenants peuvent atteindre 10% du chiffre d’affaires mondial ou national de l’entreprise concernée.
Beaucoup d’ennemis du Maroc et mêmes certains de ses soi-disant amis disent que tant que notre Roi est un homme d’affaires, il y aura toujours un conflit d’intérêt. Je crois que c’est au contraire une chance que notre souverain soit un entrepreneur si éclairé et qu’il a pu orienter le gouvernement à adopter et à mettre en œuvre des lois qui peuvent protéger le consommateur et inciter les entreprises à s’engager sur la voie d’un Maroc plus moderne et plus prospère en assumant leurs responsabilités, y compris la responsabilité sociétale.

Publié à l'occasion de la fête du trône 2019.

Le boycott, une arme à double tranchants!


L’année 2018 est celle de tous les paradoxes au Maroc ! En effet, 2018 a connu l’une des malversations politiques et économiques les plus controversées avec l’affaire Saham et une sorte de complicité avec le ministre de l’économie et des finances qui font profiter à cet assureur, grâce à un amendement dans la loi de finances, la coquette somme de 360 millions de dirhams. c’est aussi l’année d’un chaos économique marquant une période charnière qui sépare ce qui la précède de ce que nous vivons actuellement. Etant témoin d’une conjoncture économique défavorable, cette année a vu naître une forte protestation. Loin du vacarme habituel des manifestations populaires dans les rues et espaces publics, ce mouvement silencieux a été une réponse implacable à une situation qui ne fait qu’empirer.

Attestant de la colère, autant des catégories défavorisées que de la classe moyenne qui ne faisait qu’augmenter depuis le lancement des premières mesures d’austérité dont la suppression de la subvention des prix des carburants, le boycott a fait l’effet d’un pavé jeté dans la marre. Ayant été sous-estimé au départ, ses conséquences tant sur le plan économique qu’au niveau politique ne se sont pas fait attendre.

Mais, au-delà de sa dimension purement socioéconomique, cette question a également des aspects politiques. C’est d’ailleurs de là d’où vient cette volonté qui ne se limite pas seulement à rendre compte d’un mouvement de protestation, mais d’en déterminer les causes les plus profondes, d’en cerner les différents aspects et d’en tirer les leçons.

Face à cette crise, ni l’anticipation, ni la gestion du risque n’ont été au rendez-vous. Trois grandes entreprises semblent avoir été piégées dans les filets d’un mouvement qui se nourrissait de facteurs aussi variés que complexes. Leurs réactions et celle du gouvernement face au boycott étaient pour le moins catastrophiques. Au lieu de tempérer et de calmer les esprits tourmentés par une série de mesures défavorables, ces réactions ont ajouté du feu à l’ardeur d’une sérieuse colère populaire. Les dégâts ont été énormes à plus d’une échelle.

En définitive, l’année 2018 a été l’année de la réaction du consommateur marocain. N’ayant d’autres moyens de protection de ses droits, il a songé à la vengeance économique : une solution qui a porté ses fruits, mais qui a sans doute causé des dommages collatéraux pour une économie déjà en crise.



Les marins de mon pays


Une ligne invisible semble séparer la mer et la terre. Elle sépare deux mondes qui se complètent, mais surtout qui s’opposent. L’espace marin a ses richesses, ses hommes et ses coutumes alors que l’espace terrestre dicte sa loi partout et surtout dans cette intervalle séparant les deux mondes. Lors de l’embarquement ou du débarquement, ce sont à la fois les lois de la nature et des hommes qui façonnent la vie des marins et celle de leurs soi-disant maîtres les armateurs.
Tout cela se cristallise dans cet espace frontalier que l’on nomme le port. C’est un monde à part où les espérances viennent se heurter à la dure réalité d’un métier qui peine à s’industrialiser, non pas faute de volonté politique, mais plutôt à force de faire prévaloir une logique bien ancrée dans les esprits des marins.
En ne voulant que la part pour récompense, ils nous rappellent les émigrants clandestins, animés par le désir de défier la frontière maritime pour débarquer dans un espace meilleur où, semble-t-il, certains droits élémentaires sont mieux protégés. Toutefois, les aléas climatiques, des mesures de plus en plus drastiques en matière de protection du patrimoine halieutique et de la biodiversité ont fini par anéantir tous les espoirs des marins. Comme les candidats à l’émigration clandestine, ils sont traqués à la fois en mer et en terre. Ils n’ont plus de place nulle part ailleurs.
Jadis respectés dans la société et affichant fièrement leur appartenance aux métiers de la mer, les marins de la pêche artisanale sont devenus aujourd’hui l’ombre de quelques personnages bien souvent marginaux dans la société. Ce qui est bien regrettable, car ce sont ces mêmes personnages qui alimentent à la sueur de leur front un secteur à fort potentiel et qui remplissent les poches des uns et des autres au terme d’une activité commerciale des plus florissantes dans notre pays. Bien plus, c’est un secteur qui n’a jamais connu de crise même durant les conjonctures mondiale et nationale les plus défavorables.
Nous étions interpellés par toutes ces vérités qui ne reflètent point la réalité des pêcheurs. Une réalité amère à bien des égards qui nous rappelle la réalité d’un autre type de travailleurs exerçant cette fois en terre une activité dont le chiffre d’affaires est astronomique, mais qui vivent pourtant dans la misère la plus totale. Il s’agit des agriculteurs de cannabis qui font la fortune des trafiquants de stupéfiants dans le monde entier, mais dont les conditions de vie sont à la fois très dures et compliquées, voire désespérées.
Comme ceux-ci, les marins servent du caviar aux plus nantis de la planète sans jamais avoir la moindre chance ni de goûter à ce plat, ni même de voir le fruit de leur récolte servi un jour. Quand et comment cette injustice serait-elle abolie ?
La réponse à cette question dépend de cette ligne qui sépare la mer et la terre. Elle doit être visible pour tous, en toute clarté, en toute transparence et en toute probité. Ce sont ces valeurs morales sublimes qui marieront la mer à la terre dans des noces organisées par les hommes de la terre pour les hommes de la mer afin de célébrer leur bravoure et leur faire prévaloir leurs droits légitimes à une vie plus décente.